Les amendements parlementaires sous avis visent à apporter des modifications au projet de loi réformant le régime actuel de l’assistance judiciaire, actuellement prévu à l’article 37-1 de la loi modifiée du 10 août 1991 sur la profession d’avocat. Étant donné que le régime de l’assistance judiciaire s’inscrit structurellement dans la loi précitée du 10 août 1991, le Conseil d’État se doit de relever des problèmes liés à l’application de la Constitution révisée, entrée en vigueur le 1er juillet 2023, rejaillissant sur le projet de loi sous avis.
Tout en renvoyant à nouveau aux observations figurant dans les considérations générales de son avis du 14 mars 2023 au sujet du projet de loi n° 8056, entretemps devenu la loi du 29 juin 2023, le Conseil d’État rappelle qu’en vertu de l’article 18, alinéa 1er, de la Constitution, « [t]oute personne a droit à ce que sa cause soit portée devant la juridiction prévue par la loi » et qu’aux termes de l’article 97, alinéa 1er, « [l]e pouvoir judiciaire est exercé par les cours et tribunaux ». Les articles 128 et 129 de la Constitution, qui autorisent la loi à créer des organes représentatifs des professions libérales et à déterminer leur objet, leur organisation et leurs compétences, ne permettent pas d’obliger les justiciables à porter leurs recours contre les décisions en matière d’assistance judiciaire devant un organe professionnel. L’ancien article 95bis, paragraphe 2, de la Constitution, qui habilitait de législateur à « créer d’autres juridictions administratives », n’a pas été repris à l’article 99 de la Constitution révisée.
Suite à l’entrée en vigueur de la Constitution révisée, le Conseil d’État doit dès lors s’opposer formellement aux amendements 29 et 30 et à aux articles 44 et 46 du projet de loi amendé.
Une possibilité pour mettre le Conseil d’État en mesure de lever son opposition formelle serait de prévoir que tout recours relatif à la matière de l’assistance judiciaire soit porté devant les juridictions administratives. Si cette option était retenue, il serait indiqué de prévoir, pour les recours formés par les justiciables en tout cas, une procédure simplifiée dérogeant à l’article 1er, alinéa 1er, de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, disposition qui prévoit que le recours doit être « formé par requête signée d’un avocat inscrit à la liste I des tableaux dressés par les conseils des Ordres des avocats ». Dans un souci de cohérence, il convient d’attribuer la compétence pour connaître des recours des avocats contre les décisions de taxation également aux juridictions administratives. Les taxations des dossiers d’assistance judiciaire partielle pouvant être contestées à la fois par l’avocat et par son client, il n’est en effet pas indiqué de prévoir deux procédures différentes.