Le règlement de la procédure d’instruction est le point culminant de la mise en état des affaires pénales.
Une fois l’instruction achevée, l’article 128 du Code de procédure pénale confie à la chambre du conseil du tribunal d’arrondissement compétent la lourde tâche de prendre position sur l’issue de la procédure à travers une ordonnance de règlement. La juridiction d’instruction doit décider, au vu de l’ensemble des éléments dégagés lors de l’instruction, si l’affaire doit être renvoyée devant le juge répressif pour y être jugée, ou s’il n’y a pas lieu de poursuivre.
La tâche est délicate mais engagée. Dans le règlement de la procédure, la chambre du conseil apprécie tous les indices et charges sans trancher le fond, elle estime probable une condamnation tout en respectant la présomption d’innocence, elle qualifie les faits mais de manière provisoire. Selon une formule consacrée et empruntée à la jurisprudence belge, « la chambre du conseil est appelée à régler la procédure et à décider ainsi, s’il existe des charges suffisantes permettant de croire que l’inculpé a commis les faits dans les circonstances de réalisation qui tombent sous l’application de la loi pénale auquel cas elle prononce le renvoi devant une juridiction de jugement ». Si cette délimitation de l’office de la chambre du conseil est tout à fait conforme à la mission confiée par le législateur, les juridictions d’instruction ont parfois une approche plus restrictive de leur mission. On peut ainsi lire que « dans le cadre de la mission de règlement de la procédure attribuée aux juridictions d’instruction, ces dernières ne sont pas appelées à examiner le fond du litige, mais elles doivent se limiter à vérifier si des charges suffisantes que l’inculpé s’est livré aux agissements coupables qui lui sont reprochés, existent ». Le rôle de la chambre du conseil serait alors d’apprécier les charges suffisantes de culpabilité justifiant la saisine d’une juridiction répressive.
Or l’appréciation des charges suffisantes de culpabilité n’est qu’un volet de la mission des juridictions d’instruction dans le cadre du règlement de la procédure.
L’article 128 du Code de procédure pénale prévoit trois situations dans lesquelles il n’y a pas lieu de renvoyer en jugement : le non-lieu peut être prononcé pour des motifs de droit, lorsque les faits ne constituent ni un crime, ni un délit, ni une contravention (première situation), ou pour des motifs de faits, lorsque l’auteur des faits n’a pas été identifié (deuxième situation) ou lorsque les charges de culpabilité à son égard ne sont pas suffisantes pour justifier un renvoi en jugement (troisième situation). Il s’agit donc d’apprécier les charges suffisantes de culpabilité certes, mais vis-à-vis d’un comportement « qui tombe sous l’application de la loi pénale », c’est-à-dire d’un comportement punissable. Ce dernier volet, s’il n’est pas complètement ignoré par la chambre du conseil, qui vérifiera par exemple que l’action publique n’est pas prescrite et que les faits peuvent toujours être punis, est néanmoins inégalement exploité. Il ressort ainsi de la lecture de sa jurisprudence que la chambre du conseil éprouve de grandes réticences à vérifier la réunion des éléments constitutifs d’une infraction pénale, étape pourtant indispensable à la qualification des faits.
Face aux hésitations sinon contradictions du discours des juridictions d’instruction quant à leur mission dans le cadre du règlement de la procédure, une étude de la loi procédurale apparaît plus qu’opportune. C’est ainsi à la lumière de la doctrine et jurisprudence françaises et belges que cette modeste contribution tâchera d’éclaircir la portée de l’article 128 du Code de procédure pénale, à travers l’étude des motifs (I), de la motivation (II) et de l’autorité (III) de l’ordonnance de règlement.