La jurisprudence constante reconnaît à l’employeur le droit de licencier un salarié dont le poste de travail, devenu superflu, a été supprimé. La Cour d’appel a, dans une décision récente, rappelé les contours d’un tel droit de l’employeur.
Contexte:
Un salarié occupait les fonctions de «Project Manager» et était affecté au sein d’un département de l’employeur, chargé d’encadrer et de superviser la gestion des projets mis en œuvre par les différentes équipes des sociétés du groupe (ci-après le «Département»).
Afin d’améliorer le fonctionnement de ces dernières, le groupe a mis en place une nouvelle procédure uniforme de gestion des projets, augmentant l’implication directe des équipes en la matière et limitant ainsi les besoins en supervision et en encadrement.
Dès lors, la charge de travail du Département a été réduite et a pu être intégralement absorbée par le supérieur hiérarchique du salarié. Ainsi, le poste de travail du salarié est devenu superflu et a été supprimé.
Il a été proposé au salarié d’occuper un poste de «Project Manager» au sein d’une autre société du groupe, ce que le salarié a refusé, souhaitant se voir attribuer des responsabilités plus importantes.
L’employeur, qui n’avait pas de poste disponible correspondant aux demandes et qualifications du salarié, a licencié ce dernier avec préavis.
Le salarié a contesté la légalité de son licenciement devant le tribunal du travail (qui a déclaré le licenciement fondé et justifié), puis devant la Cour d’appel.
Décision de la Cour d’appel:
Dans un arrêt du 12 novembre 2020, la juridiction d’appel a confirmé le jugement de première instance et retenu que:
- l’employeur était en droit d’invoquer la réorganisation de l’entreprise pour procéder au licenciement du salarié;
- il importe peu de savoir si le salarié avait connaissance du fait qu’il risquait d’être licencié s’il n’acceptait pas le poste proposé;
- le juge ne saurait à aucun titre se substituer à l’employeur dans l’appréciation de l’opportunité des mesures prises, quelles que soient les conséquences au regard de l’emploi. Le chef d’entreprise est dès lors admis à prendre toutes les mesures de réorganisation et de restructuration, en supprimant le cas échéant un poste de travail devenu superflu pour réduire les frais, sauf à la personne licenciée de prouver qu’elle a été victime d’un abus de droit, c’est-à-dire que son congédiement est sans lien avec la mesure incriminée et que le motif économique n’a constitué pour l’employeur qu’un prétexte pour se défaire de son salarié.
Cet arrêt de la Cour d’appel s’inscrit dans le cadre de la jurisprudence constante en matière de licenciement pour suppression de poste: l’employeur peut résilier le contrat de travail avec préavis lorsque le poste de travail du salarié, devenu superflu, est supprimé, à condition cependant que cette suppression de poste ne constitue pas un prétexte pour justifier le licenciement.
Il est rappelé, en tout état de cause, que chaque licenciement doit faire l’objet d’une analyse afin de déterminer si les motifs spécifiques à l’origine de la résiliation envisagée pourraient justifier cette dernière.
Cour d’appel, 12 novembre 2020, n° CAL-2019-00330 du rôle.
Écrit par John Ted, Avocat à la Cour, Senior Associate au sein de CASTEGNARO-Ius Laboris Luxembourg