De nouvelles règles de droit positif relatives aux garanties ont été introduites dans le système juridique luxembourgeois par la loi du 10 juillet 2020 relative aux garanties professionnelles de paiement (La « Loi de 2020 »).
La garantie professionnelle de paiement a été conçue pour répondre aux besoins des praticiens pour permettre la mise en place de garanties pour les opérations financières et commerciales qui reposent sur un cadre légal en même temps flexible et fiable. Jusque-là, alors que le cautionnement reposait sur une base légale, la garantie à première demande était une création de la pratique, certes reconnue par la jurisprudence, mais avec une forte insécurité quant au risque de requalification en cautionnement.
La Loi de 2020 a pallié cette faille législative et donne aujourd’hui la possibilité de rédiger des garanties correspondant aux besoins du marché, et notamment des garanties à première demande comportant des modalités de mise en œuvre qui autrefois auraient comporté le risque d’une requalification en cautionnement.
1. La garantie professionnelle de paiement, un instrument bénéficiant d’une large liberté contractuelle
Selon la Loi de 2020 la garantie professionnelle de paiement se définit comme « l’engagement par lequel une personne, le garant, s’oblige envers un bénéficiaire à payer, sur demande du bénéficiaire ou d’un tiers convenu, une somme déterminée selon les modalités convenues, en relation avec une ou des créances ou les risques associés à celles-ci ».
La garantie professionnelle de paiement ouvre la voie à une large liberté contractuelle dans le façonnement du texte de la garantie.
Cet instrument n’abolit pas les instruments de garantie traditionnels, dont notamment le cautionnement, qui continuent d’exister, mais s’ajoute comme un outil supplémentaire.
Les documents parlementaires ont ainsi précisé que « La loi laisse une large liberté aux parties, avec la seule exigence, en ligne avec les principes généraux du droit des obligations, que l’objet de la garantie soit déterminé ou déterminable et qu’il soit conforme à l’ordre public ».
Ainsi, le champ d’application de la garantie professionnelle de paiement est des plus larges, et englobe toutes sortes de créances et de risques, et peuvent notamment être garanties « des obligations de payer ou de livrer des instruments financiers ou d’autres actifs, des créances présentes ou futures, voire même éventuelles ou hypothétiques ». Aussi, le champ d’application n’est aucunement limité à certains secteurs d’activité ou certains professionnels, la seule condition d’application de la garantie professionnelle de paiement, outre la conformité à l’ordre public, étant la référence expresse qu’y feront les parties conformément à l’article 3 de la Loi de 2020.
2. Les avantages de la garantie professionnelle de paiement
a. Le périmètre d'application de la garantie professionnelle de paiement
Le champ d’application de la Loi de 2020 a été ouvert à tout garant (personne morale ou société même sans personnalité juridique, FCP ou autres formes d’indivision ou copropriété, ou institutions publiques ou internationales), y compris les personnes physiques. Cependant, les avis émis pendant le processus législatif suggèrent que la loi a pour vocation de viser un garant agissant dans son cadre professionnel.
Il n’existe pas de restrictions quant à la qualité du donneur d’ordre ou du bénéficiaire.
En outre, la Loi de 2020 prévoit également que la garantie puisse être constituée en faveur d’un tiers (mandataire, fiduciaire, trustee) à condition que ce tiers bénéficiaire soit déterminé ou déterminable. Celui-ci aura dans ce cas les mêmes droits que ceux revenant au bénéficiaire.
Bref, pour que la garantie soit soumise au régime de la Loi de 2020 il suffira en général d’avoir un écrit « classique » ou sous forme électronique, ou tout autre support durable, faisant référence à la loi du 10 juillet 2020.
b. La liberté contractuelle conférée par la loi sur les garanties professionnelles de paiement
La Loi de 2020 laisse aux praticiens une grande liberté contractuelle pour la détermination de l’objet de la garantie (créances, obligations ou risques garantis), des conditions de la garantie (montant, termes et durée) et des modalités d’appel et de paiement de la garantie.
Par défaut, les dispositions supplétives de la Loi de 2020 correspondent aux principes d’une garantie autonome où le garant ne pourra opposer à un appel en garantie aucune exception tenant aux créances ou risques couverts.
Le principal usage de la Loi de 2020 sera l’octroi de garanties autonomes à première demande, avec comme principe que les exceptions tirées du contrat de base ne pourront pas être opposées à un appel en garantie, tout en aménageant des modalités d’exécution spécifiques et, le cas échéant se référant à certains éléments ou exceptions du contrat de base, sans que le la garantie ne puisse pour autant être requalifiée en cautionnement.
Le garant dispose après paiement d’un recours personnel contre le donneur d’ordre et est subrogé dans les droits du bénéficiaire au titre des créances concernées. Là aussi, les parties peuvent aménager les conditions d’exercice des recours personnel et subrogatoire du garant.
Le garant reste tenu envers le bénéficiaire de l’intégralité de ses obligations même si le donneur d’ordre, débiteur principal des créances concernées fait l’objet d’une procédure ou mesure d’assainissement, d’une procédure de liquidation (étant définie comme une procédure collective comprenant la réalisation des actifs et la répartition du produit de cette réalisation avec l’intervention d’une autorité administrative ou judiciaire, y compris une procédure clôturée par un concordat ou une mesure analogue, qu’elle soit ou non fondée sur une insolvabilité et indépendamment de son caractère volontaire ou obligatoire) et de toute autre situation de concours des créanciers. Une exception vaut cependant pour la loi du 8 janvier 2013 relative au surendettement.
On peut encore noter qu’il est possible de soumettre des conventions de garantie conclues antérieurement à l’entrée en vigueur de la Loi de 2020 à ladite loi, en les modifiant par voie d’avenant.
Par Me Mario DI STEFANO, Managing Partner – Avocat à la Cour, DSM Avocats à la Cour.