Jusqu’à présent le fonctionnement des associations sans but lucratif (ci-après les « ASBL ») était régi par la loi du 21 avril 1928, telle que modifiée.
En date du 28 juin 2023, la Chambre des députés a voté le projet de loi n°6054 sur les ASBL et les fondations et le 4 juillet dernier le Conseil d’Etat a dispensé ledit projet de loi du second vote constitutionnel (ci-après le « Projet de Loi »).
L’entrée en vigueur de cette nouvelle loi se fera dans les prochaines semaines et se traduira par une refonte du droit des associations et fondations.
Le présent article ne vise que les ASBL et a pour objectif d’expliquer les principaux changements apportés par le Projet de Loi.
1. Règles de gouvernance
Le Projet de Loi a tenu compte des évolutions techniques et informatiques afin de moderniser la gouvernance des ASBL
1.1 Le conseil d’administration
A titre préliminaire, il y a lieu de noter que les nouvelles règles applicables à la gestion des ASBL ressemblent beaucoup à celles régissant les sociétés plus classiques.
La gestion de l’ASBL appartient à son conseil d’administration qui sera composé de trois personnes au moins. Les membres du conseil d’administration exercent leur fonction de manière collégiale. Les mandats des administrateurs sont exercés à titre gratuit.
Le Projet de Loi introduit certaines dispositions visant à moderniser le fonctionnement du conseil d’administration :
• La convocation qui doit être adressée aux administrateurs au moins huit jours avant la tenue du conseil d’administration peut désormais être faite par voie électronique (Art. 6 (2) du Projet de Loi) ;
• Les administrateurs vont également pouvoir participer aux réunions du conseil d’administration par « visio conférence ou par des moyens de télécommunication permettant leur identification » (Art. 6 (4) du Projet de Loi) ;
• Les décisions des administrateurs pourront être prises dans le cadre des résolutions circulaires sous réserve qu’elles soient prises à l’unanimité des administrateurs et que les statuts de l’ASBL autorisent le recours à cette technique de prise de décisions ;
• Les règles applicables aux délégués à la gestion journalière sont désormais encadrées par l’Art. 7 du Projet de Loi qui envisage notamment la délégation à une personne morale.
1.2 L’assemblée générale
Tout comme pour le conseil d’administration, le Projet de Loi introduit de nouvelles règles visant à moderniser le fonctionnement de l’assemblée générale:
• Les membres sont convoqués à toute assemblée générale au moins quinze jours avant celle-ci. La communication de cette convocation se fera par voie postale ou électronique (Art. 12 (1) du Projet de Loi) ;
• Les membres pourront désormais participer à l’assemblée générale par visio conférence ou par des moyens de télécommunication permettant leur identification à condition que les statuts prévoient ce moyen de participation.
2. Possibilité d’acquérir des immeubles
La loi du 21 avril 1928, telle que modifiée, ne permettait pas à une association de posséder en propriété ou autrement que des immeubles nécessaires pour réaliser l’objet social ou les objets en vue desquels elle est formée. Cette interdiction a été supprimée dans le Projet de Loi. La possession d'immeubles non nécessaires à la réalisation de l'objet de l'association est désormais autorisée.
3. Nouvelles règles comptables applicables
Le Projet de Loi introduit un nouveau régime comptable sur mesure ayant pour objectif de garantir une comptabilité transparente.
Les associations sont catégorisées selon leur taille en utilisant les critères suivants:
3.1 Petites associations
Toute association qui pendant deux exercices consécutifs, ne dépasse pas à la date de clôture de son exercice social les limites chiffrées d’au moins deux des trois critères ci-dessous appartient à la catégorie des « petites associations » et à ce titre peut tenir une comptabilité simplifiée (Art. 18 (4) du Projet de Loi).
• nombre des membres du personnel en équivalent plein temps : moins de trois ;
• total des revenus : 50.000 euros ;
• total des actifs : 100.000 euros.
Les « petites associations » tiennent au minimum une comptabilité simplifiée renseignant l’intégralité des recettes et des dépenses de l’association.
3.2 Associations moyennes
Toute association qui n’est pas une petite association au sens de l’Art. 18 (4) du Projet de Loi et qui, pendant deux exercices consécutifs, ne dépasse pas à la date de clôture de son exercice social, les limites chiffrées d’au moins deux des trois critères ci-dessous appartient à la catégorie des « associations moyennes » :
• nombre des membres du personnel en équivalent plein temps : plus de quinze;
• total des revenus : 1.000.000 euros ;
• total des actifs : 3.000.000 euros.
Une association moyenne doit tenir une comptabilité selon un système de livres et de comptes conformément aux règles usuelles de la comptabilité en partie double.
3.3 Grandes associations
Toute association qui, pendant deux exercices consécutifs, dépasse à la date de clôture de son exercice les limites chiffrées d’au moins deux des trois critères visés au point précédent (voir Art. 3.2), appartient à la catégorie des « grandes associations » aux fins du présent article.
Une grande association doit tenir une comptabilité selon un système de livres et de comptes conformément aux règles usuelles de la comptabilité en partie double.
Une grande association est tenue de confier à un réviseur d’entreprises agréé le contrôle de ses comptes annuels.
3.4 Approbation des comptes annuels
Chaque année et au plus tard six mois après la date de clôture de l’exercice social, le conseil d’administration soumet à l’assemblée générale, pour approbation, les documents comptables relatifs à l’exercice social écoulé ainsi que le projet de budget de l’exercice suivant (Art. 18 (2) du Projet de Loi).
4. Restructurations
Le Projet de Loi propose différents moyens pour procéder à une restructuration de l’association :
4.1 Transformation en fondation
Par acte authentique et moyennant l’approbation par arrêté grand-ducal, une association peut se transformer en une fondation (Art. 30 du Projet de Loi).
Cette transformation ne donne lieu ni à dissolution ni à création d'une personnalité juridique nouvelle.
Tout projet d’acte de transformation est à adresser au ministre ayant la Justice dans ses attributions en vue de son approbation par arrêté grand-ducal.
4.2 Transformation en société d’impact sociétal
Une association peut, sans donner lieu à dissolution ni à création d'une personne morale nouvelle, adopter la forme juridique d’une société visée par la loi modifiée du 12 décembre 2016 portant création des sociétés d’impact sociétal à condition que son capital soit composé à cent pour cent de parts d’impact (Art. 31 du Projet de Loi).
En cas d’approbation du projet de transformation par l’assemblée générale, l’association adresse une demande d’agrément en tant que société d’impact sociétal au ministre ayant l’Economie sociale et solidaire dans ses attributions.
Les hypothèses visées aux points ci-dessus (4.1 et 4.2) se caractérisent par le maintien de la personnalité juridique de l’ASBL.
4.3 Fusion
La fusion s’opère par absorption d’une ou de plusieurs associations par une autre ou par constitution d’une nouvelle association (Art. 32 (1) du Projet de Loi).
Le conseil d’administration de chacune des associations qui fusionnent établit par écrit un projet commun de fusion décrivant les motifs de cette opération ainsi que l’ensemble de ses modalités.
Le projet commun de fusion, l’état résumant la situation active et passive de l’association ainsi que le rapport du réviseur d’entreprise agréé est transmis aux membres des associations concernées en même temps que la convocation à l’assemblée générale appelée à statuer sur le projet de fusion.
La fusion requiert l’approbation des assemblées générales de chacune des associations qui fusionnent ou de chacune des associations qui disparaissent, selon le cas, dans les conditions de quorum et de majorités prévues pour la modification des statuts.
La fusion entraîne la dissolution sans liquidation des associations qui disparaissent et la transmission universelle de leur patrimoine actif et passif à l’association absorbante ou à la nouvelle association, selon le cas.
Les membres de l'association qui va disparaitre vont automatiquement acquérir la qualité de membre de l'association résultant de la fusion.
4.4 Dissolution administrative
Une procédure de dissolution administrative sans liquidation a été introduite.
Le gestionnaire du registre de commerce et des sociétés peut adresser par courrier une demande de mise à jour de leur dossier aux associations. Cette procédure peut être enclenchée sous réserve de remplir deux critères objectifs cumulatifs: (1) l'absence de mise à jour des données dans un délai de six mois et (2) l'absence de tout dépôt dans le dossier auprès du registre de commerce et des sociétés depuis au moins cinq ans. En l'absence de réponses dans les délais, la procédure de dissolution administrative sans liquidation est déclenchée.
5. Dispositions transitoires
A compter de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, la loi modifiée du 21 avril 1928 sur les associations et fondations sans but lucratif sera abrogée.
Les ASBL constituées avant cette date d’entrée en vigueur devront modifier leurs statuts afin de les rendre conformes à la nouvelle loi dans un délai de vingt-quatre mois à compter de son entrée en vigueur. Dans l’intervalle , les ASBL existantes demeurent régies par les dispositions législatives antérieures.
Pour conclure, cette réforme va faire entrer les ASBL dans le 21ème siècle. En introduisant de nouvelles règles, en modernisant et en encadrant des dispositions plus anciennes, cette législation fixe indéniablement un nouveau cadre juridique aux ASBL et les modernise en profondeur.
Si vous avez des questions sur les ASBL ou si vous souhaitez être assistés dans le cadre de la mise à jour de vos statuts, n’hésitez pas à nous contacter.
Article rédigé par Me Sébastien Rimlinger
Point de contact : [email protected]