DAC 6 et obligations pesant sur les avocats
La directive (UE) 2018/822 modifiant la directive 2011/16/UE en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration (ci-après la « Directive ») a mis en place un mécanisme de déclaration des dispositifs fiscaux transfrontières potentiellement agressifs par les intermédiaires impliqués aux autorités fiscales compétentes.
Les intermédiaires visés par la Directive sont les professionnels qui conçoivent, commercialisent, organisent le dispositif fiscal ou y apportent assistance ou conseil. À défaut, c’est le contribuable lui-même qui est soumis à l’obligation de déclaration.
Si la Directive permet aux états membres de dispenser les avocats considérés comme intermédiaires de l’obligation de déclaration lorsque celle-ci violerait le secret professionnel prévu par leur droit national, elle les oblige à notifier à tous les autres intermédiaires impliqués dans le dispositif concerné leurs propres obligations de déclaration.
Tel est le cas au Luxembourg.
Il est à rappeler que la Directive a été transposée en droit interne Luxembourgeois par la loi du 25 mars 2020 aux termes de laquelle les avocats à la Cour sont également considérés comme des intermédiaires.
Apport de l’arrêt rendu le 8 décembre 2022 par la Cour de Justice de l’Union Européenne
C‘est dans ce contexte que deux organisations professionnelles d’avocats flamands ont saisi la Cour constitutionnelle belge d’un recours tendant à la suspension d’un décret transposant la Directive et relatif à l’obligation incombant aux avocats de notification aux autres intermédiaires.
La Cour constitutionnelle belge a saisi la Cour de Justice de l’Union Européenne (ci-après la « CJUE »).
Par un arrêt rendu le 8 décembre 2022[1], la CJUE a jugé que l’obligation faite à un avocat par la Directive de notifier à tout autre intermédiaire qui n’est pas son client les obligations de déclaration qui lui incombent n’est pas nécessaire dans la lutte contre la planification fiscale agressive.
De plus, l’obligation susmentionnée viole le droit au respect des communications entre l’avocat et son client.
Partant, l’obligation imposée à un avocat de notification aux autres intermédiaires est invalide au regard de l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne (ci-après la « Charte »).
Par ailleurs, la CJUE rappelle également que le secret professionnel des avocats et notamment la confidentialité des communications entre l’avocat et son client bénéficient d’une protection spécifique prévue par la Charte ainsi que la Convention européenne des droits de l’homme.
Elle réaffirme la mission fondamentale confiée aux avocats dans une société démocratique, à savoir la défense des justiciables.
Par Maître Alex PHAM, Avocat à la Cour, et Maître Julien DECHOUX-SCHIRRA, Avocat.
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[1] Arrêt de la Cour Européenne de Justice du 8 décembre 2022, Orde Van Vlaamse Balies e.a., C-694/20