La contestation, de la part d’un salarié, de la modification des conditions de travail par l’employeur constitue-t-elle une faute de nature à justifier un licenciement avec préavis?
Les heures de travail, l’affectation à un poste de travail ainsi que les jours de repos sont des éléments essentiels pour le salarié dans le cadre de son travail au sein de l’entreprise mais aussi dans le cadre de sa vie privée.
Ainsi, une modification de la part de l’employeur des horaires d’un salarié en imposant des plages de travail s’étendant jusque dans la nuit et incluant les samedis et les dimanches alors qu’initialement, le contrat de travail prévoyait un horaire de travail de 38 heures par semaine, du lundi au vendredi, conduit à un changement important des conditions de travail du salarié. En outre, une modification du nombre de jours de repos ainsi qu’un changement d’affectation du salarié s’analysent aussi comme des modifications soudaines en défaveur de ce dernier.
Pour assurer une certaine protection au salarié, la modification de ces éléments passe par une procédure lourde prévue par la loi que l’employeur se doit de respecter [1] . Si cette procédure n’est pas respectée, la modification instaurée par l’employeur peut être annulée par le tribunal le cas échéant.
Dans une affaire récente [2] , une salariée a été licenciée pour avoir refusé d’accepter son nouveau poste et, par conséquent, le changement des heures de travail. L’employeur rappelait de son côté qu’une clause de flexibilité quant aux horaires et à l’affectation de la salariée était prévue au sein du contrat de travail de la salariée, lui permettant ainsi de modifier ces éléments.
La salariée a contesté les motifs invoqués dans le cadre de son licenciement et, plus particulièrement, le caractère réel et sérieux de ces derniers. La salariée a estimé que son refus d’accepter ces modifications ne constituait pas une faute justifiant un licenciement avec préavis. En effet, la salariée a soutenu que cette modification d’affectation impliquait l’accomplissement de nouvelles tâches, une rétrogradation et des horaires de travail s’étendant du lundi au dimanche.
De plus, la salariée a affirmé que ces changements ne lui ont pas été notifiés dans le cadre de la procédure prévue par la loi [3] .
La salariée a donc saisi le Tribunal du travail de Luxembourg pour contester le caractère réel et sérieux des motifs invoqués dans le cadre de son licenciement.
La Cour d’Appel a, à l’instar du Tribunal de travail, retenu, qu’en modifiant le temps de travail de la salariée ainsi que ses plages de travail les étendant jusque dans la nuit et incluant les samedis et les dimanches, l’employeur a procédé à une modification des éléments essentiels sans respecter la procédure de notification et que cette modification a eu des répercussions sur la vie privée de la salariée.
La Cour d’Appel retient donc que la contestation, de la part de la salariée, de la modification faite par l’employeur de ses conditions de travail intervenue dans le non-respect de la procédure prévue par le Code du travail n’est pas illégitime.
Ainsi, la Cour d’Appel retient que les motifs invoqués par l’employeur à la base du licenciement de la salariée n’étaient ni réels, ni sérieux.
En conclusion, la Cour d’Appel affirme, dans cette décision, que la contestation d’une salariée de la modification de la part de l’employeur de ses conditions de travail est légitime si cette modification intervient en défaveur de la salariée et, de plus, si cette modification ne respecte pas la procédure de notification prévue par la loi.
Dans ce cas, la salariée est en droit de demander l’annulation de la modification et l’employeur ne peut pas baser son licenciement sur la contestation légitime de la salariée de la modification de ses conditions de travail.
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[1] Article L. 121-7 du Code du travail : lorsque l’employeur occupe 150 salariés au moins, il doit convoquer l’intéressé par lettre recommandée ou par écrit dûment certifié par un récépissé en indiquant l’objet de la convocation ainsi que la date, l’heure et le lieu de l’entretien. Une copie de la lettre doit être adressée à la délégation du personnel.
[2] Cour d’appel, 6 janvier 2022, n°CAL-2020-00828 du rôle.
[3] Articles L. 124-2 et L. 124-3 du Code du travail.